On a failli ne pas le reconnaître. Pourtant c'était bien lui, touffe ébouriffée et barbe clairsemée, assis sur le banc dimanche soir tandis que ses coéquipiers lyonnais ferraillaient contre l'OM (0-0). Yoann Gourcuff effectuait là son énième grand retour dans le groupe de Rémi Garde cette saison, après un énième pépin physique. Trop juste, il est finalement resté assis, voyant son concurrent Clément Grenier entrer en jeu à sa place. Le meneur de jeu international parviendra-t-il à renouer le fil de son excellent début de saison avant la fin du Championnat ? À dix journées de cette échéance, rien n'est moins sûr.
Pour mémoire, dans la foulée de plusieurs sorties convaincantes de Gourcuff avec l'OL, le sélectionneur Didier Deschamps avait été jusqu'à l'appeler en équipe de France pour l'amical en Italie du 14 novembre dernier. Il a même pu jouer un petit quart d'heure. Depuis ? Un véritable trou noir, qui l'a vu manquer toute la fin d'année 2012 quand Malbranque puis Grenier s'accaparaient la lumière des projecteurs. Sa dernière blessure, une lésion musculaire aux adducteurs, date du 11 février. Elle a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase.
"Gourcuff est un souci"
Il faut en effet se souvenir qu'à l'été 2010, l'OL avait déboursé 22 millions d'euros (un record à l'époque) pour arracher le milieu offensif aux Girondins de Bordeaux. Le club rhodanien avait alors justifié ce montant en assurant que la belle gueule du joueur, conjuguée à son jeu gracieux, en faisait un argument marketing imparable, susceptible de générer d'importantes recettes de merchandising, tout en offrant à Lyon une nouvelle exposition médiatique. Une sorte de David Beckham à la française.
Deux ans plus tard, le président Aulas lançait un plan de rigueur pour assainir les comptes de son club. Et les langues se délient aujourd'hui peu a peu. "C'est un garçon qui a du talent et qui aime le foot, justifiait Rémi Garde lundi dernier sur RTL. Il a besoin de beaucoup de confiance autour de lui, d'avoir un environnement très favorable pour s'exprimer. A l'OL on essaye de faire le maximum. On ne peut pas dire qu'on y arrive superbement bien." Un mois auparavant, Bernard Lacombe, le conseiller du président, se faisait encore plus direct : "Gourcuff est un souci."
"On lui trouve toujours des excuses"
Le problème n'est évidemment pas que physique. Selon plusieurs voix concordantes, le meneur de jeu s'applique à rester toujours en marge du groupe, sans parler à personne, pas même à son entraîneur. Tant et si bien qu'il n'y a plus grand monde pour le défendre à l'OL, où ses airs mystérieux agacent plus qu'ils n'intriguent. Tout l'état-major lyonnais attend désormais avec impatience la première occasion de s'en débarrasser. "Je souhaiterais qu’il aille se forger à Arsenal, où il y a déjà une école française. Ou alors dans un grand club espagnol. Tout le monde le lui a dit" appuyait de son côté son grand ami, le préparateur physique Tiburce Darou.
Sauf que, quand l'Atletico Madrid, 3ème de Liga, et l'OL se mettaient d'accord sur un prêt avec option d'achat en janvier, le joueur refusait de partir. Parce qu'il fallait sacrifier une grosse partie des 6,8 millions d'euros annuels qu'il touche à Lyon ? Ou par peur de disparaître pour de bon de la circulation ? Toujours est-il que le joueur s'accroche à son club. "On lui trouve toujours des excuses. Arrive un moment où il faut qu'il prouve tous les jours, jugeait pour sa part l'ancien Lyonnais Grégory Coupet en mai 2012. Mais ça veut aussi dire s’investir dans la vie du club et du groupe... Maldini n'a allumé qu'un seul joueur dans sa vie, c’est Gourcuff. Cela veut dire quelque chose."